Comme Martinu, Ernest
Yitzhak Bloch est mort il y a 50 ans cette année. Né à Genève en 1880
dans une famille juive non pratiquante, il étudie le violon avec Eugène
Ysaÿe à Bruxelles et la composition en Allemagne, à Francfort. Après
avoir rencontré en 1905 Edmond Fleg, écrivain nationaliste juif, il a
la révélation de sa judaïté et sera considéré plus tard comme un
chantre d'Israël. Plusieurs échecs professionnels le conduisent à
émigrer. Il s'installe en 1916 aux Etats-Unis, d'abord à Cleveland puis
à San Francisco et prendra la nationalité américaine en 1924. Rien n'a
vraiment été fait pour la connaissance de ce musicien même en cette
année du cinquantenaire de sa disparition. Pourtant son œuvre est
vaste, variée et de qualité. La seule pièce connue de Bloch est le
"Schelomo" pour violoncelle et orchestre datant de 1916. Le reste de
l'œuvre de ce compositeur est complètement passé à la trappe. Pourtant,
le "Service sacré" est une œuvre très attachante et l’on s'étonne
qu'elle ne soit jamais entendue en France. Créée en janvier 1934 elle
utilise un grand orchestre, un grand chœur avec un baryton solo et
quelques interventions solistes provenant du chœur. Toute l'œuvre est
baignée d'une belle lumière recueillie et touchante qui n'est pas sans
rappeler celles des grands oratorios du début du siècle comme, par
exemple, "The dream of Gerontius" d'Elgar. Le texte y est pour la plus
grande part en hébreu et, dans la cinquième pièce, l'hébreu est associé
à l'anglais. Le climat oriental de cette musique évoque par instants
"Le Roi David" d'Honegger ou le "Samson et Dalila" de Saint-Saëns. La
place du chœur est prédominante et l'écriture polyphonique prend par
moments des accents très originaux. Six parties se succèdent évoquant
l'attachement à Israël, le Dieu éternel, Moïse et Jacob, les enfants
d'Israël, la fraternité et la paix, en d'autres termes "cette âme
complexe, ardente, agitée, que la bible fait vibrer en moi" disait
Bloch lui-même. Darius Milhaud écrivit en 1947 une œuvre sur la même
thématique qui fût également créée à San Francisco. Comme le disait Bloch lui-même "bien qu'il soit intensément juif
dans ses origines, le message de ce Service sacré me semble avant tout
être un don d'Israël à l'humanité tout entière". On ne saurait dire
mieux et on espère que cette très envoûtante musique soit enfin connue
du plus grand nombre.
Gilles Lesur
Référence
discographique: Parmi les enregistrements disponibles, celui du
London Symphony Orchestra avec The Zemel choir (Antony Saunders, chef
de chœur) et Louis Berkman, tous dirigés par Geoffrey Simon (Chandos)
est très réussi. Parmi les autres enregistrements qui seraient
disponibles l'un a été réalisé en Afrique du Sud sous la direction de
Elli Jaffe et l'autre à Londres avec le London Philharmonic Orchestra
et sous la direction du compositeur. Les enregistrements de Léonard Bernstein avec le New York Philharmonic, publié chez Sony dans la collection "The Royal Edition" illustrée de dessins du Prince de Galles et celui de Zubin Mehata avec l'orchestre Philharmonique d'Israël et Thomas Hampson sont également magnifiques.
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